Promenades cotentines

Promenades cotentines

Un chemin et la caresse du vent… J’allais mettre mes pas dans mes mots… Quelques jours sous le soleil de mai à aller de baies en falaises, de prairies en villages et de vallons en ports.

Je n’ai jamais oublié les joutes verbales entre le prof et la lycéenne : aux charmes de son village et de sa région qu’il me vantait je répliquais en louant la douceur exquise des rives du Léman… Des années plus tard je me baladerais dans son « pays »… Enfin dans un tout petit morceau de son pays, celui qui se trouve tout en haut, sur la gauche, quand on regarde la carte du Cotentin.

Carteret. son village de bord de mer, maisons bourgeoises d’une autre époque aux murs gris clair qui grimpent sur les collines, une rue étroite bordée de quelques boutiques entre le port de plaisance et le port de pêche. Tout au bout, la plage, des dunes et des rochers et une alignée de cabanes blanches et bleues qui se font faire une beauté pour les jours d’été. Ce matin-là la mer est basse, partie je ne sais où tant on ne voit plus qu’un horizon immense de sable boueux et de roches verdâtres.

Il est temps de partir.

La route des caps longe la côte, serpente entre les collines, se faufile dans les villages et côtoie une multitude de chemins, invitations évidentes aux promenades.. aux promenades dans le vent. Il est partout, tendre et violent, il bouscule, il caresse, il chahute, il joue.. Il ne vous lâche pas un seul instant. Sur le haut des falaises il glisse sur la lande, dans le creux des chemins il siffle entre les talus, sur le bord des dunes il fouette le sable.

Le sentier des douaniers s’en va vers le cap de la Hague… Quelques heures à me laisser emmener vers la pointe de Rozel, l’anse de Sciotot puis le cap de Flamanville et son port Diélette. Se prélasser, flâner, perdre son regard loin, si loin sur la mer, se laisser envahir par les senteurs portées par le vent qui jamais ne cesse de tourbillonner à vous en faire chavirer puis cheminer à nouveau vers l’anse de Vauville, continuer encore vers le Nez de Jobourg, la baie d’Elcagrain…

Des falaises abruptes et déchiquetées couvertes de lande, de bruyères et d’ajoncs fleuris, kaléidoscope géant aux jaunes, mauves, blancs, bleus, rouges et verts qui passent en un clin d’œil de l’éclatant au sombre quand le soleil et les nuages se font la cour, de longues plages au sable blanc silencieuses et tranquilles, de minuscules criques en galets qui prennent un malin plaisir à se cacher pour mieux se laisser découvrir.
Et puis le bocage aux murs en cailloux et aux fleurs multicolores. Quelques moutons indifférents, des vaches nonchalantes, des chèvres curieuses, un tracteur chargé de paille qui cahote sur le chemin poussiéreux…
« On se croirait en Irlande » disent parfois les gens. Je ne sais pas, je ne connais pas l’Irlande et puis je déteste comparer, alors, comme toujours, je profite simplement de là où je suis en laissant vagabonder mes sens au rythme de mes pas.
Les villages ont un charme fou. Ruelles étroites et tortueuses, vieilles et solides maisons entourées d’hortensias immenses. Ce sont peut-être les premiers rayons de ce soleil printanier qui font dormir les chats et les chiens dans l’ombre bienvenue ? Il règne ici une atmosphère paisible qui me fait penser qu’il doit être bon s’y poser.

Voici Goury et son phare de bout du monde. Rochers aux rouges bruns et aux roses pâles cisaillés par des vagues qui étincellent dans le soleil et qui éclaboussent dans le vent et puis un peu plus loin Port Racine, « le plus petit port de France » parait-il : une dizaine de barques, minuscules, colorées et joyeuses qui dansent dans les bourrasques, quelques maisons blanches blotties les unes contre les autres comme pour mieux résister à l’assaut des embruns dans l’unique petite rue et tout au bout un café à la porte qui grince et carillonne où il fait bon se réchauffer quand le vent et la pluie sont venus à bout de votre témérité !

Je ne sais pas vous dire où il faut regarder, je ne sais pas vous dire où il faut marcher, où il faut s’arrêter, je ne sais pas vous dire le nom des roches, le nom des fleurs, je ne sais pas vous dire quelle est cette ile au loin, quelle est cette plage tout près, de quelle époque est l’église de ce village, je ne sais même pas vous dire où manger des plats savoureux. Je ne sais pas parler des falaises du Nez de Jobourg qui sont parmi les plus hautes d’Europe, du somptueux panorama de la baie d’Elcagrain, ou bien encore de l’anse de Vauville à l’immense plage aux courbes alanguies, des minuscules villages aux noms en ille qui s’abritent dans les vallons ou se prélassent au bord des dunes : Biville, Vauville, Herqueville…

C’est que je ne suis pas guide ! Juste une promeneuse qui aimerait vous donner l’envie de partir découvrir la beauté sauvage de ce tout petit bout de terre de Normandie, que le soleil, les nuages et le vent vous raconteraient bien mieux que moi.

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