Voyage au pays des grèves

Voyage au pays des grèves

Aujourd’hui mardi.
C’est demain que commence le voyage.
Je regarde le plan général de la ville puis je vais page par page faire mon itinéraire. Le 14e, rue d’Alésia, bd du Général Leclerc jusqu’à Denfert Rochereau, ça je maitrise il me faut 1/2 heure de marche ; rue de l’Observatoire jusqu’à Port Royal ; je passe dans le 6e, bd St Michel, ouh là… c’est loooooong ; passage pont St Michel, bd du Palais, pont au Change ; je change de page, me voici dans le 1er, bd de Sébastopol, gloups, là aussi c’est bien long ; je passe dans le 2e, toujours Sébastopol, puis sur la gauche, rue de Réaumur jusque rue du Sentier puis rue des Jeuneurs et là, enfin, je serai arrivée au centre où je participe à un stage depuis hier… Bien bien bien… Histoire d’avoir quelques repères, je mesure les distances : 10 cm pour 30 mn, ok, donc, là 10 cm, puis 10 autres, encore 10 et encore 10… j’en suis à 2 heures, et puis les 3 ou 4 immeeeeenses ronds-points que je dois traverser… Allez, 2h30 de marche à prévoir. Le cours commence à 9h. Je vais donc partir vers 6h30, non non pas vers mais à 6h30.

Jour 1.
C’est allègrement que je sors dans la nuit fraiche du matin. Les trottoirs sont pleins de marcheurs et les autos avancent tranquillement. Ma 1ere 1/2 heure de marche se fait presque joyeusement, si, si, ça m’amuse de voir ce méli-mélo des vélos, des rollers, des patinettes et des piétons qui font leur possible pour se croiser, se doubler et.. s’éviter ! J’arrive en vue de Port Royal.. Sympa mais quand je pense à ce qui m’attend, peut-être que ce serait bien de trouver une voiture pour faire un bout de chemin. Je guette donc les feux, dès que j’en vois un au rouge j’accélère pour me trouver à hauteur des voitures arrêtées et à chaque fois que j’arrive, le feu se met au vert et les voitures démarrent…….. J’en ai marre ! C’est qui celui qui change la couleur au moment où j’arrive ? Ah une voiture qui s’arrête : le conducteur a une tête sympa, je vais toquer à la vitre et ouvre la portière :
« Bonjour, si vous allez vers le bd St Michel, vous pourriez m’avancer un peu ?
Vous allez où ?
Loin, jusqu’à la rue de Réaumur
Bigre ! Je ne vais pas jusque là mais je peux vous avancer »
Cool !
Après m’avoir demandé (en riant) si j’avais l’habitude de monter dans les voitures des inconnus nous bavardons agréablement et je vois défiler avec un grand plaisir les kms que je ne fais pas à pied !
Ce charmant monsieur fait même un détour sur son itinéraire pour me déposer plus loin qu’il avait prévu et je n’ai plus que 30 mn de marche pour arriver… en avance et fière de moi ! Je ferai le soir le même parcours en sens inverse et dans les mêmes conditions.

Jour 2.
Je pars 1/2 heure plus tard, conséquence : les rues plus animées, déjà des embouteillages et des klaxons qui s’excitent… ça promet ! Et si j’essayais le métro ? J’arrive sur le quai, pas trop de monde, il est indiqué 24 mn d’attente pour la prochaine rame, j’attends. En fait 10 mn plus tard, c’est toujours 24 mn d’attente…. Même pas drôle !
Une voix non-gréviste annonce à intervalles réguliers l’état de circulation sur les différentes lignes :
« Ligne 10, aucune rame
Ligne 12, une rame toutes les 45 mn » et ainsi de suite.
Le mec qui fait cette annonce doit en avoir ras le bol parce que la voix se fait de plus en plus trainante et de plus en plus désabusée mais ça fait marrer et pendant ce temps on ne râle pas.
Ligne 4, une rame est à Orléans (il n’a pas dit ‘porte’, c’est de l’humour ?)…. Génial, elle sera là dans quelques minutes !
Le métro est déjà bondé… Pas grave, on pousse, on se tasse et on se cale. Je n’ouvrirai plus jamais une boite de sardines sans avoir une pensée émue pour ces petites bestioles !
A Chatelet, c’est l’émeute : les portes des voitures s’ouvrent, 20 personnes sortent et 300 veulent entrer… ça crie, ça hurle, ça se bouscule.. Horrible, on me donne un coup violent dans le dos, un coude sans doute ? La vache, quel con !
Je sors 3 stations avant celle prévue, je n’en peux plus et je ferai le reste du trajet à pied. Je suis épuisée ! On va peut-être commencer le cours par une petite séance de relaxation ?
Le soir retour entre marche et métro (j’ai eu de la chance, un peu moins de monde).

Jour 3.
Retour au bureau aujourd’hui. Une gentille conductrice me dépose à Convention, je gagne 45 mn de marche. Et voilà qu’il n’y a aucun métro qui circule sur la ligne 12… C’est donc après 50 mn de marche que j’arrive. Je commence à en avoir asseeeeeez !
Et ce n’est pas terminé ! Galère l’après-midi pour arriver à St Lazare : je veux partir en Normandie, j’ai besoin de m’aérer les neurones. Comme il n’y a toujours pas de métro, je prends le tramway jusqu’à la Défense, puis un train de banlieue jusqu’à la gare. Pourquoi faire court quand on peut faire long quand même ?
La gare est noire de monde, tous les yeux sont rivés sur le tableau qui annonce le n° des voies pour les trains -rares- en partance. Des CRS arrivent, que se passe-t-il ? Une personne m’explique qu’ils sont là pour permettre aux gens de monter dans les trains ! Ah bon ? On ne peut pas monter tout seul ? J’ai compris : dès que le train est annoncé une foule extraordinairement nerveuse se rue pour être sûre de pouvoir partir, et là encore des cris et des bousculades… Le train part, surchargé de gens fatigués, énervés et râleurs ; de nombreuses têtes dodelineront bientôt.

Lundi, on recommence, mardi aussi sans doute, et après ? Je préfère ne pas y penser…

Pour voyager au pays des Grèves il est recommandé d’avoir le matériel suivant : des chaussures de marche, des vêtements confortables, un bagage léger, un plan de la ville, moi j’ai aussi un livre, et puis on peut ajouter une dose de patience et une réserve de sourires, ça peut aider !

Ah, j’oubliais ! L’intitulé de mon stage c’était : « VIVRE A L’AISE EN SITUATION DE STRESS »

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